Johnny Five |
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« [Thomas C. Durand (La Tronche en Biais)]
— Critiquez-vous les uns les autres.
[…]
[Mickaël Launay (Micmaths)]
— Ça devient un processus tout à fait normal. »
(Extrait de la conférence Vulgarizators 2.0 – Table ronde) jeudi 28 juillet 2016
« Je voudrais dire deux choses. Une d’ordre intellectuel, et une d’ordre morale.
Le conseil intellectuel est celui ci.
Lorsque vous étudiez une question quelconque,
ou que vous examinez une quelconque philosophie, demandez-vous uniquement :
"Quels sont les faits ?"
"Et quels sont les observations qui les confirment ?"
Ne vous laissez jamais détourner par ce que vous voudriez croire,
ou parce que vous pensez qui serait bénéfique pour notre société
si on se mettait à les croire.
Mais regardez uniquement les faits et rien d’autre.
Voilà le conseil d’ordre intellectuel que je souhaiterais donner.
Et le conseil d’ordre moral que je souhaiterais donner est très simple.
Je dirais : "L’amour est sage, la haine est insensée."
Notre monde devient de plus en plus interconnecté.
Nous devons apprendre à nous tolérer les uns les autres.
Nous devons nous faire à l’idée qu’il y aura toujours des gens
pour dire des choses que nous n’aimons pas.
Ce n’est qu’ainsi que nous parviendrons à vivre ensemble.
Si nous voulons vivre ensemble et non mourir ensemble,
nous devons apprendre une certaine forme de charité et une certaine forme de tolérance,
qui seront absolument indispensable
à la survie de l’espèce humaine sur cette planète. »
(Message aux générations futures ; Bertrand Russell) vendredi 12 février 2016
Il suffit d’ouvrir les yeux pour voir que les conquêtes de l’industrie qui ont enrichi tant d’hommes pratiques n’auraient jamais vu le jour si ces hommes pratiques avaient seuls existé, et s’ils n’avaient été devancés par des fous désintéressés qui sont morts pauvres, qui ne pensaient jamais à l’utile, et qui pourtant avaient un autre guide que leur caprice.
C’est que, comme l’a dit Mach, ces fous ont économisé à leurs successeurs la peine de penser. Ceux qui auraient travaillé uniquement en vue d’une application immédiate n’auraient rien laissé derrière eux et, en face d’un besoin nouveau, tout aurait été à recommencer.
(Science et méthode ; Henri Poincaré) vendredi 11 septembre 2015
Si nous avions un vrai système d’éducation, on y donnerait des cours d’autodéfense intellectuelle.
« [Daniel Mermet]
—
[…]
vous allez tout de suite sur des histoires de langages
[…]
[Christine Jackse]
— […]
on parle beaucoup de charges sociales ou de coût du travail.
On pourrait se dire que du point de vue du patronat cette option là est plutôt légitime.
Elle est plus étonnante quand elle est entendue de la part des socialistes ou de certains syndicats de salariés,
qui eux aussi parlent de charges sociales au lieu de parler de cotisations sociales,
et qui parle de coût du travail au lieu de parler de salaire.
La cotisation sociale est un salaire.
C’est un salaire qui est prélevé immédiatement depuis le produit intérieur brut
au même titre que le profit, que le salaire directe.
[…]
Quand on dit baisser les charges sociales en réalité on dit baisser le salaire.
[…]
[D. M.]
— Mais vous savez très qu’on a des problèmes de compétitivité.
[…]
[C. J.]
— C’est un autre mot pour désigner finalement la concurrence.
[…]
on va regarder plutôt la compétitivité du point de vue du coût du travail.
Pareil, on ne regardera pas la compétitivité du point de vue du coût du capital qui est le profit.
[…]
[D. M.]
— […]
on pourrait, dans le cadre de cette compétitivité indispensable, réduire, peut-être, la part revenant aux actionnaires.
[…]
[C. J.]
— […]
C’est effectivement le coût finalement du capital, le profit,
qui constitue aujourd’hui 40% du PIB,
qui a pris 8 points en 30 ans du salaire, salaire directe et salaire indirecte.
8 points ont basculés donc, du salaire au profit.
Alors, on aurait pu se dire dans le profit, pourquoi pas si le capital investit.
[…]
Depuis 30 ans l’investissement est resté bloqué à hauteur d’à peu près 20% du PIB.
Par contre, le surplus, qui a basculé au profit, est allé aux dividendes, et à l’épargne des entreprises.
Donc on voit bien qu’on est absolument pas dans une visée d’amélioration de la productivité, de la compétitivité,
de la position de la France tout simplement. »
(Extrait de l’émission radio Là-bas si j’y suis de France Inter du 12 novembre 2012 : Les débats du Diplo) mercredi 23 janvier 2013
« Une politique écologique est nécessairement une politique anti-capitaliste : une politique qui cherche à limiter le champ de la consommation marchande et des échanges marchands. »
(Extrait de l’émission radio Là-bas si j’y suis de France Inter du 20 novembre 2012 : André Gorz, sortir du capitalisme (1)) dimanche 2 décembre 2012
“Tout ça, sans compter que l’humanité en subit d’autres, des outrages, autrement plus graves, en ce moment,
les gouines et les pédés n’y sont pour rien,
je trouve Lionel Jospin mal organisé dans ses priorités de crispation.
Il y a, en 2012, des atteintes à la morale autrement plus brutales
et difficiles à admettre que l’idée que deux femmes veulent se marier entre elles. Qu’est-ce que ça peut faire ?
[…]
Personne n’a envie de prendre modèle sur vous.
Occupez-vous plutôt de construire plus d’abris pour les sdf que de prisons, ça, ça changera la vie de tout le monde.
Dormir sur un carton et ne pas savoir où aller pisser n’est pas un choix de vie, c’est une terreur politique,
je m’étonne de ce que le mariage vous obnubile autant,
que ce soit chez Jospin ou au Vatican,
alors que la misère vous paraît à ce point supportable.”
(Virginie Despentes répond à Lionel Jospin et aux anti-mariage pour tous ; Virginie Despentes) mercredi 14 novembre 2012
« Au fond et si la solution ne serait pas celle-ci : Les ultra-religieux fichent la paix à tous les autres pendant la vie sur Terre. Et en échange les athées s’engagent à plus rien réclamer pendant toute l’éternité. »
(Extrait de l’émission Mise au point du 23 septembre 2012 : Peut-on encore critiquer les religions ? ; Philippe Geluck) mercredi 26 septembre 2012
Les idées n’ont pas à être respectées ; elles ont à être confrontées au Réel, sans ménagement.
(Définitions, États d’Âme, Contresens et Sens Contraires ; Johnny Five) samedi 22 septembre 2012
Une œuvre d’art est le produit unique d’un tempérament unique. Sa beauté vient de ce que son auteur est ce qu’il est. En aucun cas de ce que les autres veulent. À la vérité, dès qu’un artiste prend conscience de ce que désirent les autres et s’applique à les satisfaire, il cesse d’être un artiste. Il devient un artisan, terne ou amusant, un commerçant, honnête ou malhonnête ; il ne peut plus prétendre être un artiste. L’art est l’expression de l’individualisme le plus intense que le monde ait jamais connue, et j’aurais même tendance à dire la seule.
(Oscar Wilde) lundi 13 août 2012
Citer les mots de quelqu’un, c’est mettre sous verre une collection de beaux papillons qui ont perdu leur lumière et leur éclat.
(Oscar Wilde) lundi 13 août 2012
C’était là ce qui s’était passé en Marius. Il avait même, pour tout dire, un peu trop versé du côté de la contemplation. Du jour où il était arrivé à gagner sa vie à peu près sûrement, il s’était arrêté là, trouvant bon d’être pauvre, et retranchant au travail pour donner à la pensée. C’est-à-dire qu’il passait quelquefois des journées entières à songer, plongé et englouti comme un visionnaire dans les voluptés muettes de l’extase et du rayonnement intérieur. Il avait ainsi posé le problème de sa vie : travailler le moins possible du travail matériel pour travailler le plus possible du travail impalpable ; en d’autres termes, donner quelques heures à la vie réelle, et jeter le reste dans l’infini. Il ne s’apercevait pas, croyant ne manquer de rien, que la contemplation ainsi comprise finit par être une des formes de la paresse ; qu’il s’était contenté de dompter les premières nécessités de la vie, et qu’il se reposait trop tôt.
[…]
Mais trop de rêverie submerge et noie. Malheur au travailleur par l’esprit qui se laisse tomber tout entier de la pensée dans la rêverie ! Il croit qu’il remontera aisément, et il se dit qu’après tout c’est la même chose. Erreur !
La pensée est le labeur de l’intelligence, la rêverie en est la volupté. Remplacer la pensée par la rêverie, c’est confondre un poison avec une nourriture.
(June 1, 2012/ Dilbert ; Scott Adams) vendredi 1er juin 2012
« [George Steiner]
— Il a essayé [Arthur Koestler], très généreusement,
de me convertir un peu à ses vues sur la parapsychologie,
et j’ai trouvé ça affreux.
Je dis le mot affreux parce que je crois que
la raison humaine est une chose infiniment précieuse, délicate, vulnérable,
et qu’il faut lutter à outrance pour la sauvegarder.
Et un monsieur qui croie aux fantômes, qui croie à la télépathie, qui croie au retour des morts…
ça me donne froid dans le dos.
Et quand ça vient d’une intelligence immense comme celle d’Arthur Koestler c’est doublement le cas.
[…]
[Laure Adler]
— Et vous vous ne croyez pas aux revenants et encore moins aux fantômes ?
[George Steiner]
— Ah ! non, je crois à peine à ceux qui sont là déjà maintenant, j’ai des problèmes.
Mais aux revenants certainement pas.
Mais cette homme, infiniment intelligent, qui dans les Les Somnambules
a écrit des pages sur Kepler et Copernic,
qui racontait que monsieur Uri Geller
pouvait arrêter toutes les montres en passant la main…
Qu’est-ce que vous voulez qu’on dise !
C’était des moments très difficile.
Heureusement, il y avait le whisky, heureusement. »
(Extrait de l’émission Hors-champs de France Culture du 3 avril 2012 : George Steiner (2/5). Les maîtres avec George Steiner) lundi 16 avril 2012
« [Jean-Luc Mélenchon]
— Quand on se propose d’abattre le capitalisme financier, on se propose d’abattre le capitalisme tout court. Voilà.
Car c’est…
on ne peut pas imaginer qu’on va revenir à la société… au stade antérieur,
où on va retomber comme disent certains sur ce bon vieux capitalisme rhénan,
qu’on aimait tant parait-il.
Je ne me souviens pas qu’on l’ai aimé tant que ça à l’époque où il régnait mais enfin bon.
Par contre ce qui est vrai…
[Mediapart]
— Il était peut-être, il avait peut-être des modes de partages, des revenus… plus égalitaires…
[Jean-Luc Mélenchon]
— Le capitalisme ne partage pas,
c’est le rapport de force qui pousse au partage et ensuite le capitalisme s’adapte. »
« [Jean-Luc Mélenchon] Le citoyen normalement doit s’arracher de ses humus, et il doit dire non pas ce qui est bon pour lui mais ce qui est bon pour tous. »
(Extraits de l’interview de Jean-Luc Mélenchon du 23 avril 2012 par Mediapart : Mediapart 2012 – Le grand entretien avec Jean-Luc Mélenchon) lundi 9 avril 2012
« Les scientifiques sont accusés de croire qu’on va résoudre tous les problèmes patati patata, alors que notre attitude c’est de considérer que justement c’est la seule sauvegarde qu’on a étant donné un monde dans lequel il y a tant d’irrationnel et tant de non-sens, d’absurdités, de croyances injustifiées et que… C’est l’histoire de Voltaire […] Vous trouvez les mêmes histoires chez pratiquement tous les rationalistes mais Voltaire donne l’idée du type avec une bougie dans la nuit dans une forêt et il rencontre un inconnu qui lui dit souffle sur la bougie tu y verras beaucoup mieux. Et la bougie c’est la raison mais c’est tout, ce n’est pas pour ça que ça éclaire la forêt, je veux dire, mais on n’a pas autre chose. Et donc, c’est assez irritant de devoir sans arrêt répéter. Si on lit par exemple les écrits politiques de Russell, on voit qu’il insiste toujours, contrairement par exemple dans sa critique du marxisme etc., il insiste toujours sur les aspects irrationnels de l’action humaine. Alors que beaucoup de gens ont tendance à expliquer l’action humaine, même s’ils l’a critique, en terme par exemple de la recherche d’intérêts, économiques par exemple. On va dire voilà, on fait la guerre pour des raisons économiques etc. Lui dira non il y a des aspects irrationnels. Alors quand je dis ça on me dit « oui mais toi tu es rationaliste », mais justement, les rationalistes sont des gens qui pensent que l’être humain a trop tendance à être irrationnel et qui par conséquent pensent que nous devons défendre la rationalité. Les gens qui sont de l’autre côté de l’argument souvent ont tendance à trouver que le problème c’est que le monde est trop rationnel, le système est trop rationnel, le système économique est trop rationnel, vous comprenez. Et où c’est la science et la technologie qui domine tout. Je ne pense pas ça une seconde ! Je ne pense pas ça une seconde. La science jusqu’à un certain point à une influence dans notre vie à travers la technologie, mais ce n’est pas pour ça qu’on est rationnel, ni rationaliste, ni qu’on peut s’en passer, qu’on doit souffler sur la bougie, pas du tout. »
(Extrait de l’émission Semences de Curieux de La Première du 30 janvier 2011 : La Science : quelle est sa place ? 2/2 avec Jean Bricmont) lundi 19 mars 2012
L’attribution erronée à Voltaire provient du livre La Lueur d’une bougie de Normand Baillargeon.
Égaré dans une forêt immense pendant la nuit, je n’ai qu’une petite lumière pour me conduire. Survient un inconnu qui me dit : Mon ami, souffle ta bougie pour mieux trouver ton chemin. Cet inconnu est un théologien.
Et ces sports de spectacle ont aussi d’autres fonctions utiles.
[…]
Mais ce qui est important, c’est que ce sentiment de fidélité irrationnelle à une sorte de communauté dépourvue de sens est un entraînement à la subordination, au pouvoir et au chauvinisme. Et bien sûr, vous regardez les gladiateurs. […] Tout cela développe fortement des aspects extrêmement anti-sociaux de la psychologie humaine. Je veux dire que ces aspects existent, ils existent sans aucun doute. Mais ils sont mis en relief, exagérés et révélés par les sports de spectacles : compétition irrationnelle, fidélité irrationnelle à des systèmes de pouvoir, acceptation passive de valeurs tout à fait horribles, vraiment. En fait, il est difficile d’imaginer quelque chose qui contribue plus fondamentalement aux attitudes autoritaires, en plus du fait que cela mobilise vraiment beaucoup d’intelligence et que cela éloigne les gens d’autres sujets.
(Comprendre le pouvoir ; Noam Chomsky) mercredi 30 novembre 2011
Le contrôle de la population est une autre question où il ne sert à rien que vous agissiez, il faut que tout le monde agisse. C’est comme la circulation : vous ne pouvez pas rendre sûr la conduite d’une voiture en conduisant bien vous-même ; il faut qu’il y ait une sorte de contrat social, sinon cela ne marchera pas. […] cela ne fait guère de différence que vous ayez l’intention de conduire prudemment si tous les autres conduisent comme des bombes, n’est-ce pas ? Ce qui est ennuyeux, c’est que c’est comme ça que fonctionne le capitalisme. La nature du système est qu’il est censé être conduit par la cupidité ; personne n’est censé s’inquiéter des autres, personne n’est censé se tracasser pour le bien commun, ce n’est pas censé vous motiver, c’est le principe du système. La théorie est que la poursuite de desseins privés mène à la satisfaction des besoins publics, c’est ce qu’on vous apprend dans les facultés d’économie. C’est tout à fait n’importe quoi, bien entendu, mais c’est ce qu’on vous enseigne. Et aussi longtemps que le système fonctionnera ainsi, oui, il va s’autodétruire.
[…]
Il n’y a rien de mauvais dans la forme [de gouvernement] – je veux dire qu’il y a certaines choses mauvaises dans la forme – mais ce qui est vraiment mauvais, c’est le fond. Aussi longtemps que l’on a un contrôle privé sur l’économie, les formes ne font aucune différence, parce qu’elles n’y peuvent rien. On pourrait avoir des partis politiques où tout le monde se rencontre et participe, et où vous établissez les programmes ; agissez de façon participative autant que vous voulez, cela n’aura qu’un effet marginal. La raison en est que le pouvoir est ailleurs.
[…]
En fait, si vous réfléchissez bien à la logique de tout ceci, vous verrez qu’aussi longtemps que le pouvoir restera concentré dans des mains privées, tout le monde doit s’engager à s’assurer que les gens riches soient contents, parce que sinon, personne d’autre n’obtiendra rien.
[…]
Le capitalisme est parfait pour le tiers monde : nous sommes ravis que ces pays soient inefficaces. Mais pas pour nous. De plus, et ça s’est vérifié depuis le début de la révolution industrielle, il n’est pas une seule économie dans l’histoire qui se soit développée sans une intense intervention de l’État, tels de hauts tarifs protectionnistes, des subsides, etc. En fait, toutes les choses que nous empêchons le tiers monde de faire ont été les bases de départ du développement partout ailleurs – je pense que c’est sans exception.
(Comprendre le pouvoir ; Noam Chomsky) mercredi 30 novembre 2011
Ainsi, ce que font effectivement les médias, c’est prendre l’ensemble des postulats qui expriment les idées fondamentales du système de propagande, que ce soit à propos de la Guerre Froide ou du système économique ou de « l’intérêt national », et de présenter alors un espace de débat à l’intérieur de ce cadre : ainsi le débat ne fait qu’augmenter la force des postulats, en les incrustant dans l’esprit des gens comme s’ils constituaient le spectre tout entier des opinions possibles. Alors, vous voyez, dans notre système, ce que vous pourriez appeler « la propagande d’État » n’est pas exprimée comme telle, comme ce serait le cas dans une société totalitaire : mais elle est plutôt implicite, présupposée, elle fournit le cadre des débats qui sont admis dans la discussion dominante.
En fait, la nature du système occidental d’endoctrinement n’est typiquement pas comprise par les dictateurs : ils ne comprennent pas à quoi sert un « débat critique » qui incorpore les postulats des doctrines officielles et qui, du coup, marginalise et élimine toute discussion critique authentique et rationnelle. Avec ce qu’on a parfois appelé « le lavage de cerveau en liberté », les critiques, ou au moins les « critiques responsables », apportent une contribution majeure à la cause en enfermant le débat dans des limites acceptables : c’est pourquoi ils sont tolérés et, en fait, même honorés.
[…]
Et la raison [de la non mise en cause sérieuse de cette thèse] en est que le « Modèle de propagande » est en fait valide, et qu’il prédit qu’il sera non pertinent – et, en réalité, même incompréhensible dans la culture de l’élite – aussi bien démontré qu’il soit. Et cela, parce que ce qu’il révèle ébranle des institutions idéologiques très efficaces et utiles. De sorte qu’il les dessert. Et sera donc éliminé.
(Comprendre le pouvoir ; Noam Chomsky) lundi 28 novembre 2011
Détruire les abus, cela ne suffit pas ; il faut modifier les mœurs. Le moulin n’y est plus, le vent y est encore.
Notre monde n’est nullement aussi « complexe » que le prétendent ceux qui veulent en assurer la perpétuation. Il est même, dans ses grandes lignes, d’une parfaite simplicité.
(Saint Paul – La fondation de l’universalisme ; Alain Badiou) dimanche 27 novembre 2011
Les hommes, tu ne les as jamais pénétrés. Tu ne les as pas non plus véritablement observés, ni non plus aimés ou détestés à fond. Tu les as feuilletés. Accepte donc que, par eux semblablement feuilleté, toi aussi tu ne sois que feuillets, quelques feuillets.
Art.2 Casser les autres
Quand tu t’es enfilé, comme ça, une peau de crocodile sur le sentiment…
Alors on ne t’approche plus que par ouï-dire :
Ah ! celui-là, on ne sait pas qui c’est, exactement.
Et tu poursuis ton chemin, ta cig ou ton chien.
Si tu as le sens de la réverbération…
Les chiens ne sont pas les Autres.
Il fallait bien le savoir un jour ou l’autre, non ?
Les chiens, ça réverbère un quelque part qui est juste sur la bulle de l’Univers, un peu en dehors.
Ils sont un peu en dehors, les chiens.
La colère peut être folle et absurde ; on peut être irrité à tort ; on n’est indigné que lorsqu’on a raison au fond par quelque côté. Jean Valjean se sentait indigné.
« [Cornelius Castoriadis]
— […] la dissolution des grandes idéologies politiques.
Idéologie soit révolutionnaire, soit vraiment réformiste,
mais pas réformiste pour rire, qui voulait vraiment changer des choses dans la société.
Pour mille et une raisons, qu’on ne peut pas discuter maintenant, a été déconsidérée, a cessé de correspondre au temps, etc., etc.,
à correspondre aux aspirations des gens, à la situation de la société, à correspondre à l’expérience historique.
Bon tout le monde nous dit, bon…
C’est quand même étonnant, je vais me fâcher quand j’y pense, n’est-ce pas.
Il y a eu cet espèce d’énorme événement qui est l’effondrement… de l’URSS, et du communisme.
Est-ce que vous pouvez me dire mais une seule personne,
parmi les politiciens – pour ne pas dire parmi les politicards – de gauche qui existent actuellement,
qui a vraiment réfléchi sur ce qui s’est passé, pourquoi ça c’est passé et a, comme on dit bêtement, tiré des leçons ?
Alors que évidement quelque chose comme ça appelle, une évolution de ce type
à la fois d’abord dans sa première phase…
l’accession à la monstruosité si je puis dire, le totalitarisme, le goulag, etc., etc., bon.
Et puis dans l’effondrement méritait une réflexion très approfondie et quelque chose comme conclusion
sur ce que un mouvement qui veut changer la société peut faire, doit faire, ne doit pas faire, ne peut pas faire.
Zéro ! N’est-ce pas, nous sommes d’accord.
Bon, alors, donc comment voulez-vous ?
C’est-à-dire, ce que l’on appelle le peuple, les masses, etc., etc., tire les conclusions qu’il peut tirer,
mais il n’est pas vraiment éclairé.
Vous me parliez tout à l’heure du rôle des intellectuels.
Bon, qu’est-ce qu’ils font ces intellectuels.
Bon, alors la droite ?
Qu’est-ce qu’ils ont fait maintenant depuis Reagan, Thatcher
et puis le socialisme français ?
Ils ont ressorti le libéralisme pur et dur du début du XIXe siècle
qu’on avait combattu pendant cent cinquante ans, qui aurait conduit la société à la catastrophe.
Parce que finalement le capitalisme, c’est vrai le vieux Marx il avait pas tort.
Il avait tort sur un autre plan.
Si le capitalisme avait été laissé à lui-même, il se serait effondré mille fois, enfin cent fois.
Il y aurait eu une crise de surproduction tous les ans.
Pourquoi il ne s’est pas effondré ?
Parce que les travailleurs ont lutté, ils ont imposé des augmentations de salaire, donc ils ont créé des énormes marchés de consommation interne.
Ils ont imposé des réductions du temps de travail, ça a absorbé tout le chômage technologique.
On s’étonne que maintenant il y a du chômage,
mais depuis 1940 jusqu’à aujourd’hui le temps de travail n’a pas diminué.
Et on hésite on dit "trente neuf heures", "trente huit et demie", "trente sept trois quarts",
c’est absolument grotesque !
Bon, donc…
Il y a eu ce retour du libéralisme, et moi je suis sûr que si ça continue comme ça,
enfin je suis sûr, on ne peut jamais être sûr dans l’histoire.
Mais, je ne sais pas ce qui va se passer,
moi je ne vois pas comment l’Europe en tout cas pourra sortir de cette crise dans laquelle elle est.
Hors les libéraux viennent et ils disent : "Il faut faire confiance au marché, etc., etc."
Mais enfin, ce que disent maintenant les néo-libéraux,
c’est les économistes académiques eux-mêmes qui l’ont réfuté pendant les années trente.
Ils ont montré qu’il ne peut pas y avoir d’équilibre dans les sociétés capitalistes.
C’était pas des révolutionnaires, c’était pas des marxistes !
Ils ont montré aussi que tout ce que racontent les libéraux sur les vertus du marché
comme quoi il garanti une allocation, la meilleure allocation possible des ressources,
une distribution des revenus la plus équitable possible,
c’est des foutaises !
Tout ça, ça a été démontré, ça n’a pas été réfuté.
Mais il y a eu une grande offensive économico-politique des couches gouvernantes et dominantes,
qu’on peut symboliser par les noms de Reagan et de Thatcher,
et même de Mitterrand d’ailleurs !
Qui a dit :
"Bon, vous avez assez rigolé, maintenant, on va vous licencier, on va dégraisser l’industrie,
– on va éliminer la "mauvaise graisse" comme on dit chez Juppé ! –
bon, et puis vous verrez que le marché à la longue vous garanti le bien-être."
[Daniel Mermet]
— Pourquoi pas d’opposition à ce libéralisme ?
[C. C.]
— Je ne sais pas.
C’est extraordinaire, bon, on a parlé, il y a une sorte de terrorisme, pratiquement, de la pensée unique comme on dit,
la pensée unique c’est-à-dire cette non-pensée.
Elle est unique car c’est la première pensée qui est une non-pensée intégrale n’est-ce pas,
la pensée unique libérale.
Bon, personne n’ose s’opposer.
Et qu’est-ce que c’était… l’idéologie libérale a sa grande époque ?
[D. M.]
— 1850 ?
[C. C.]
— Oui, c’est ça, 1850.
C’était quand même une grande idéologie, parce qu’on croyait au progrès.
Ces libéraux-là ils pensaient que, par exemple […],
ils pensaient qu’avec le progrès il y aurait à la fois l’élévation du bien être économique.
[D. M.]
— Enrichissez-vous.
[C. C.]
— Enrichissez-vous.
Mais même quand on s’enrichissait pas comme dans les classes dominées disons, exploitées,
on allait avoir précisément moins de travail, des travaux moins pénibles,
on serait moins abruti par l’industrie :
c’était les grands thèmes de l’époque.
Constant a dit les ouvriers ne peuvent pas voter, parce qu’ils sont abrutis par l’industrie.
Il le dit carrément Benjamin Constant, les gens étaient honnêtes à l’époque.
Donc il faut un suffrage censitaire.
Bon, après on a dit bon non, parce que le temps de travail diminue,
parce que il y a l’alphabétisation, il y a l’éducation,
il y a des espèces de lumières qui ne sont plus les lumières subversives du XVIIIe
mais enfin qui se diffusent comme ça dans la société, la science se développe, l’humanité s’humanise, les sociétés se civilisent,
et comme ça petit à petit, asymptotiquement, on arrivera à une société où il n’y aura pratiquement plus d’exploitation,
où cette démocratie représentative tendra à devenir une vraie démocratie, etc., etc.
[D. M.]
— Pas mal ?
[C. C.]
— C’était pas mal.
Sauf que ça marche pas comme ça !
Ça a pas marché comme ça et ça marche pas comme ça,
c’est-à-dire que le reste s’est réalisé et tout ça ça n’a pas humanisé l’humanité, ça n’a pas civilisé la société,
ça n’a pas adouci les capitalistes, on le voit maintenant n’est-ce pas.
Bon, c’est-à-dire c’est pas les hommes, c’est le système, et donc ça ne marche pas comme ça.
Et… ça fait que de l’intérieur les gens ne croient plus à cette idée.
L’idée est une, comment dire, l’humain…
la disposition en général est une disposition de résignation.
Même chez les représentants du libéralisme, ils osent pas dire plus.
Quel est le grand argument maintenant ?
C’est peut-être mauvais… mais l’autre terme de l’alternative était de loin le pire !
C’est ça le grand argument.
[D. M.]
— Oui ça se résume à ça, c’est vrai ! Oui c’est ça.
[C. C.]
— Ça se résume à ça. Et c’est vrai que ça joue, ça joue, ça…,
c’est vrai que ça a glacé pas mal les gens.
Ils se disent : "Bon mais, si on bouge trop, on va pas arriver à un nouveau goulag ?" par exemple.
Donc, ça s’est derrière cet espèce d’épuisement idéologique de l’époque
et je crois que on en sortira que si vraiment il y a
– enfin c’est une tautologie de dire ça comme ça –
mais enfin il faut qu’il y ait, il faut attendre, il faut espérer,
il faut travailler pour qu’il y ait une résurgence
à la fois d’une critique puissante du système et d’une activité des gens, d’une participation des gens. »
(Extrait de l’émission radio
Là-bas si j’y suis
de France Inter du 23 octobre 2008 :
Cornelius Castoriadis ;
Retranscription :
La montée de l’insignifiance)
mercredi 13 juillet 2011
N. Chomsky : […]
Un système fédéré, décentralisé de libres associations, incorporant des institutions économiques et sociales, constituerait ce que j’apelle l’anarcho-syndicalisme ; il me semble que c’est la forme appropriée d’organisation sociale pour une société technologique avancée, dans laquelle les êtres humains ne sont pas transformés en instruments, en rouages du mécanisme. Aucune nécessité sociale n’exige plus que les êtres humains soient traités comme des maillons de la chaîne de production ; nous devons vaincre cela par une société de liberté et de libre association, où la pulsion créatrice inhérente à la nature humaine pourra se réaliser pleinement de la façon qu’elle décidera.
De nouveau, comme M. Foucault, je ne vois pas comment un être humain pourrait ne pas s’intéresser à cette question.
[…]
Prenons le droit international, instrument très faible, nous le savons, mais qui comporte des principes très intéressants. Sous beaucoup d’aspects, c’est l’instrument des puissants : c’est une création des États et de leurs représentants. Les mouvements de masse des paysans n’ont absolument pas participé à son élaboration.
La structure du droit international reflète ce fait ; elle offre un champ d’intervention beaucoup trop vaste aux structures de pouvoir existantes qui se définissent comme des États contre les intérêts des masses de gens organisées en opposition aux États.
C’est un défaut fondamental du droit international, et je pense qu’il est dénué de validité au même titre que le droit divin des rois. C’est simplement un instrument des puissants désireux de conserver leur pouvoir. Nous avons donc toutes les raisons de nous y opposer.
(De la nature humaine : justice contre pouvoir ; Noam Chomsky, Michel Foucault) vendredi 29 octobre 2010
◼ Il a été scientifiquement démontré que les facultés extrasensorielles qui sont normalement endormies chez chacun d’entre nous (telles que la télépathie, la clairvoyance, la prémonition) sont plus actives chez les sujets dédoublés. Le temps, qui n’a une signification que dans la dimension humaine, est en réalité un espace. Dans un monde où la pensée est instantanée, où les déplacements se font à la vitesse de la lumière, une vision simultanée du passé (rétrocognition), du présent (voyance) et du futur (prémonition) devient parfaitement réalisable. Grâce à ces facultés inespérées, l’individu extériorisé peut alors se transformer en conseiller, consolateur, aide invisible, protecteur en cas de danger. Il acquiert, en outre, les capacités de voir à distance ou à travers les objets opaques (clairvoyance) et de communiquer télépathiquement en influençant la pensée des autres.
◼ […]
◼ Le corps astral, capable de se mouvoir à la vitesse de la lumière, possède comme un véritable tapis roulant des Mille et une Nuits servant sa fabuleuse possibilité de se déplacer instantanément. En effet, il suffit de formuler le désir de visiter n’importe quel lieu pour que le corps subtil s’y trouve immédiatement transporté…
(Entrez dans… les secrets du voyage astral : Connaître les techniques de sortie hors du corps pour mieux se dédoubler ; Laura Tuan) jeudi 21 octobre 2010
« […] vous comprenez, des gens qui en parlent [de para-trucs] il y en a toujours, mais des gens qui montrent il n’y en a jamais. »
(Extrait d’une interview de Claire Bretécher par Michèle Cédric) jeudi 30 septembre 2010
« [Daniel Mermet]
— Bon, ben ça ça ne dit pas quand est-ce qu’on en finit avec le capitalisme.
Frédéric Lordon.
[Frédéric Lordon]
— Ha ! Ben alors ça c’est…
[D. M.]
— Ce sera peut-être la prochaine fois, non ?
[F. L.]
— Ha ! mais….
Oui c’est ça, mais c’est toujours ça,
il faut toujours attendre la crise d’après quoi pour en finir.
C’est ça le truc.
Et alors, on en revient à cette expression autour de laquelle on déroule cette discussion :
se débarrasser du capital.
Bon se débarrasser du capital ça peut vouloir dire plein de choses.
Fermer la bourse, c’est la signification spécifique que prend cette formule
quand on considère le capital comme moyen de financement.
Mais on peut comprendre le mot capital autrement,
en lui donnant une portée conceptuelle beaucoup plus étendue.
On peut le comprendre non plus techniquement comme instrument de financement mais en revenant,
tout simplement à ce que disait papa Marx du sujet.
On peut comprendre le capital comme rapport social.
Le capital comme rapport social
c’est que le pouvoir découle de la propriété des moyens de production.
[D. M.]
— Oui.
[F. L.]
— C’est que les salariés se soumettent à l’autorité des propriétaires des moyens de production.
Et donc, le capital comme rapport social,
c’est le coup de force qui brise la symétrie première entre le capital et le travail.
Parce que lorsque l’on regarde la chose de près,
on s’aperçoit que les apporteurs de machines
ne peuvent pas plus se passer des apporteurs de force de travail que l’inverse,
pour produire quoique ce soit.
Sauf que précisément le capital c’est plus que du capital machine.
À l’origine c’est du capital argent.
Et entre le capital argent et le travail,
celui des deux qui accédera à la domination,
c’est celui qui peut attendre le plus longtemps en se passant de l’autre.
Et alors à ce jeu là le résultat des courses est connu d’avance.
La force de travail elle a besoin de becqueter tous les jours,
le capital lui il peut attendre.
Alors, par après, vous avez…
Toute la grande machine du droit va se mettre en branle
pour venir consacrer et durcir cet état de fait.
Mais à l’origine c’est ça.
Donc, si vous voulez on peut comprendre la rupture de symétrie entre le capital et le travail.
Mais comprendre ça n’équivaut pas à justifier.
Demeure toujours aussi injustifiable l’empire de la propriété sur la production,
le pouvoir des propriétaires ou de leurs délégués sur les producteurs.
Et là, il faut apercevoir ce qu’il y a d’inhabituel,
dans cette chose là, qui nous paraît si habituel.
Et pour ça, si vous voulez, je voudrais prendre un instant pour revenir en amont mais…
au problème de la constitution des collectifs de production.
Mais, en reformulant le problème de la manière la plus simple et en même temps la plus générale possible.
Sur ce sujet là le discours libéral alors est tout à fait catégorique,
c’est le discours de l’entrepreneur, et de la légitimité de celui qui entreprend.
Bon, la grande question est la suivante :
jusqu’où s’étend la légitimité de celui qui entreprend,
et en particulier est-ce qu’elle s’étend
jusqu’à la légitimité de commander ceux qui entrent dans son entreprise ?
Le discours libéral dit oui sans la moindre hésitation.
Mais ceci n’a rien d’évident du tout.
Qu’est-ce que c’est qu’un entrepreneur ?
Un entrepreneur c’est quelqu’un qui a envie de faire quelque chose.
Ben ça c’est très bien d’avoir envie de faire un truc mon bonhomme.
Et surtout faut y aller, faut pas hésiter, moi je…
Si c’est ça la liberté d’entreprendre moi je suis tout à fait pour.
Donc l’entrepreneur est un gars qui a un désir de réalisation de choses.
Sauf que, c’est son désir à lui, c’est son affaire à lui.
Donc, qu’il le fasse tout seul, qu’il le fasse par ses propres moyens, s’il le peut.
Alors là vous voyez que les choses commencent à se compliquer.
Parce que, supposez que vous voulez créer une entreprise de vente de papillons.
Bon ça c’est très bien, aller à la chasse aux papillons on peut y aller tout seul,
donc on a besoin de personne.
Vous voulez créer une entreprise de génie civile, ça va devenir plus compliqué.
Tout seul à la rigueur vous arriverez à monter un muret,
mais si vous voulez passer à l’étape au-dessus parce que l’ambition vous vient
et que vous voulez attaquer les ponts suspendus ou les centrales nucléaires,
vous allez avoir besoin de monde.
Alors, c’est exactement à ce moment là que les choses basculent et que tout change.
Les choses basculent à partir du moment
où vous n’êtes pas capable de satisfaire tout seul votre désir de réalisation
et vous avez besoin du concours d’autres personnes.
Et alors là, la question est la suivante :
comment faire entrer d’autres personnes dans votre désir à vous ?
La réponse capitaliste est très simple et tranchante : c’est l’enrôlement.
Et l’enrôlement il a même un nom dans le capitalisme,
ça s’appelle le rapport salarial.
Alors que toute notre époque se gargarise avec ses nobles principes philosophiques,
qui sont d’ailleurs ceux du libéralisme même,
qui proclame l’égalité en droit,
l’égalité en droit et en dignité de tous les individus,
hors le rapport d’enrôlement salariale qui est un rapport asymétrique d’obéissance contre monnaie,
c’est tout sauf un rapport égalitaire.
Alors, comment notre époque parvient-elle à se dépêtrer de cette contradiction béante,
entre d’une part des principes politiques qui proclament l’égalité,
égalité en droit mais surtout égalité en participation aux affaires collectives,
et d’autre part,
des formes d’organisation économique collective qui bafouent ouvertement ces principes ?
Et bien la réponse est qu’elle n’y arrive pas.
Alors il faut l’aider un peu, la pauvrette, hein j’vais dire.
Comment faire pour l’aider à remettre d’équerre ce qui est ici notoirement bancal ?
La première des choses pour rétablir un peu de cohérence, dans ce foutoir intellectuel,
c’est de
réaffirmer le caractère fondamentalement politique de toutes les formes de vie collective,
et ceci quelque soit leur objet.
Une communauté familiale c’est une communauté qui a une part politique.
Dans la famille, il y a des rapports de pouvoir, il y a des équilibres de puissance.
Une communauté de macramés sur le causse Méjean ou sur le Larzac,
c’est une communauté qui a sa politique.
De même pour un collectif d’artistes.
Et bien, de la même manière, les collectifs productifs qu’on appelle les entreprises
sont des communautés politiques.
Alors ça à l’air de rien ça, et en même temps ça commence à déblayer sacrément le terrain.
Et je vais vous dire pourquoi, parce que,
si on reconnaît aux collectifs productifs qu’on appelle encore provisoirement les entreprises,
si on leur reconnaît leurs caractères politiques,
alors on peut y importer tous les principes
qui sont en vigueur dans l’ordre politique tel qu’on le conçoit classiquement.
Et notamment le principe de l’égale participation de chacun aux affaires communes.
Et c’est ça le point décisif.
Et alors on peut le faire en disant ceci.
D’une entreprise il serait exagérer de considérer qu’elle est une chose publique,
au plein sens du terme publique.
On ne peut pas la dire une chose publique parce qu’elle est trop limitée en nombre et en finalité,
ça concerne trop peu de personnes, pour des finalités trop étroites.
En revanche,
on peut incontestablement dire d’elle qu’elle est une chose commune.
C’est la chose commune de ceux qui y travaillent, et de ceux qui la font vivre.
L’entreprise donc n’est pas une chose publique, en latin res publica,
elle n’est pas une république.
En revanche on peut dire qu’elle est une chose commune, une res communa,
une récommune, si vous me passez ce néologisme étymologiquement fondé.
Et dire que l’entreprise est une récommune
c’est pas seulement se donner le plaisir d’un jeu de mot si vous voulez,
c’est se donner la possibilité de faire jouer toute une série d’associations d’idées,
et d’en conclure logiquement que,
si en principe,
j’insiste sur en principe parce que je sais ce qui sépare les principes de la réalité aussi hein.
Si en principe la démocratie est reconnue comme la seule forme admissible de vie de la république,
et bien de la même manière
elle devrait être considérée
comme la seule forme admissible d’organisation des récommunes productives.
Voilà, c’est ça l’idée.
Alors qu’est-ce que ça veut dire concrètement ça ?
Beh, ça veut dire que, là où dans l’entreprise capitaliste,
la participation politique est entièrement indexée sur la participation financière,
le droit à la parole découle de la propriété financière.
Je veux dire pour avoir voix au chapitre,
pour se prononcer sur le devenir de l’entreprise,
pour dire qu’elle direction elle va prendre,
ce que seront l’emploi, les salaires, les conditions de travail,
les localisations, ou les délocalisations,
il faut être un actionnaire.
Et bien à l’encontre de ça dans l’entreprise récommunale,
la participation politique revient exclusivement et sur une base de partage égalitaire…
[D. M.]
— Aux salariés.
[F. L.]
— Aux salariés.
À ceux qui travaillent…
[D. M.]
— Vous êtes sûr que vous n’êtes pas en train d’inventer l’autogestion là,
comme vous êtes là, Frédéric Lordon ?
[F. L.]
— Et bien très honnêtement je crois que j’ai redécouvert le fil à couper le beurre.
Ben c’est exactement ça je vais dire, c’est comme ça que ça s’appelle,
on peut l’appeler autogestion, récommune, récommunalisme,
récommunisme, communisme tout court.
Parce que à l’origine, le communisme,
c’est pas cette espèce de chose qui a été défigurée sous le nom plus exact de socialisme réel,
le communisme c’est le pouvoir des soviets.
Je vais dire là il va y avoir quelques évanouissements hein à l’antenne,
j’en suis désolé mais.
Et les soviets qu’est-ce que c’est, c’était des assemblées.
[D. M.]
— Tant que vous ne parler pas d’islamisme ça va.
[F. L.]
— Ça va, oui, ça ira.
Bon les soviets, dans l’URSS, non existés qu’un an à peine.
Bon ils ont été trucidés dans les conditions qu’on sait,
mais le principe était là.
Et oui, c’est ça l’autogestion.
[Odieu]
— Ma banque est mon amie, elle s’occupe de moi.
[…] »
(Extrait de l’émission radio Là-bas si j’y suis de France Inter du 1er mars 2010 : Et si on fermait la bourse ? Avec Frédéric Lordon) lundi 29 mars 2010
« — Il y a un terrible silence des partis politiques par rapport au travailler.
— Ah ça y a pas de doute. Oui oui ça il n’y a aucun doute.
Les partis politiques sont totalement aveuglés.
Bon ils sont sur la question de l’emploi
et certainement pas sur la question du travail et du travailler quoi.
Alors après bon, comment dire, il y a des,
des prestidigitateurs qui arrivent à nous faire croire qu’ils s’intéressent au travail
mais bon voilà, ça tient pas la route.
Ce qui est terrifiant c’est que ce qui porte en soubassement
l’interrogation des fondements même de la démocratie
n’est pas au cœur du débat politique.
— Comment vous envisager l’avenir ?
— Mais à supposer que demain hop on décide de faire autrement
eh ben il va quand même y avoir un temps d’inertie lourd hein.
Donc la casse dans le monde du travail elle est pas terminée hein.
C’est simple malheureusement.
On est tous concerné, on est tous impliqué dans cette histoire.
Oui je pense que…
on est partie quand même, partie prenante de ça.
Ça ne marche que parce que nous y mettons notre zèle hein.
C’est désespérant d’un côté mais c’est une chance de l’autre hein.
Si c’est nous qui somme responsables de ça c’est,
c’est qu’on peut le changer.
C’est dans la mesure où nous sommes justement consentant
et nous apportons notre concours à ce système que nous pouvons le changer.
Ça c’est sûr hein.
Pas de fatalité là-dedans. »
(Extrait de l’émission Par Ouï-Dire de La Première du 11 janvier 2010 : Suicide au travail) vendredi 22 janvier 2010
« — […] C’est peut-être sa vérité qui est simplement différente de la nôtre.
— Écoute, la vérité c’est pas comme une portée de petits chiens où tu choisis ton préféré.
Une seule vérité, et elle frappe à la porte. [toc toc toc toc]
— Mais, disons alors qu’il a sa vérité à lui et qu’il y est très attaché.
Ajoute à ça un caractère violent d’humeur irascible, et ce qu’on obtient c’est …
— Qu’est-ce que vous voulez ? »
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(Pushing Daisies saison 1, épisode 8 Douces amertumes ; Bryan Fuller) lundi 28 décembre 2009
La violente baisse d’audience que l’on constate aujourd’hui sur TF1 et d’autres médias de masse a une causse triviale : l’extrême médiocrité des programmes, qui deviennent de plus en plus pulsionnels, finit par engendrer le dégoût des téléspectateurs. Déjà, en 2004, 56 % d’entre eux déclaraient au cours d’une enquête menée par Télérama ne pas aimer la télévision qu’ils regardent – et qu’ils ne continuent de regarder « que » parce qu’ils en sont devenus dépendants. La télévision se substituant aux relations interindividuelles, celles-ci s’éteignent lentement mais sûrement, et il en résulte un désert affectif où, si vous coupez le récepteur, la misère familiale apparaît pour ce qu’elle est : insupportable.
[…]
Les médias sont de nos jours tous soumis au marketing – et à « la tyrannie de l’audience quart d’heure par quart d’heure », pour reprendre des mots de Sarkozy sur France 3 – du fait de leur financement par la publicité. Il faut les contraindre à développer une autre utilité sociale, et par-là même, à trouver d’autres ressources que la publicité. Et il faut progressivement et législativement diminuer la part de celle-ci dans les budgets des médias, publics aussi bien que privés. […]
Parallèlement à la diminution des recettes publicitaires, l’État doit lui-même lancer des programmes d’édition multimédia dans le domaine éducatif, constituant des marchés publics comme le furent en leur temps les manuels scolaires, moteur économique extraordinaire pour le développement de l’édition française : tel fut le génie de Jules Ferry.
[…]
Les consommateurs désirent de moins en moins, mais dépendent de plus en plus de besoins artificiellement produits, qui sollicitent toujours plus leurs comportements pulsionnels aux dépends de leur libido, c’est-à-dire de leur désir.
C’est ainsi que le téléspectateurs tend à devenir dépressif (la dépression est précisément une perte de désir) et que les médias deviennent eux-mêmes massivement pulsionnels et populistes : ils cherchent à tirer le « temps de cerveau disponible » vers le bas, c’est-à-dire qu’ils l’encouragent à suivre une pente naturelle, contre laquelle lutte toute élévation culturelle et toute éducation. […]
[…]
Le premier à avoir théorisé le psychopouvoir que servent les médias de masse est un neveu de Freud, Edward Bernays. […] On découvrait alors que pour toucher les gens, il fallait solliciter l’inconscient et non leur conscience. Bernays inventa une technique de captation du désir, qu’il appela public relations, l’ancêtre du marketing, et qui visait à détourner l’individu des objets producteurs de son désir (sa mère, son père, sa femme, ses enfants, son travail, son investissement politique, sa religion, en bref, tous ses objets d’investissement affectif) pour amener ce désir vers les marchandises.
Le psychopouvoir est ce qui constitue ainsi une économie libidinale consumériste. Le problème est que cette économie est autodestructrice : en court-circuitant les milieux, fonctions et structures symboliques où sont les objets producteurs du désir individuel, elle est devenue un obstacle au développement et au fonctionnement de l’appareil psychique, c’est-à-dire de la transformation des pulsions en désir. Le désir est en effet ce qui, par structure, diffère la satisfaction de la pulsion. Et l’éducateur est celui qui apprend à celui qu’il élève ainsi à trouver plus de plaisir dans le désir que dans la pulsion. Cependant, chacun d’entre nous est toujours prêt à désapprendre cette différence entre désir et pulsion, et c’est cette tendance régressive qu’exploite aujourd’hui le psychopouvoir en désapprenant le désir – et en installant ainsi une véritable bêtise systémique, à laquelle personne n’échappe tout à fait.
(Bernard Stiegler in Faut-il interdire les écrans aux enfants ? ; Entretiens de Bernard Stiegler et Serge Tisseron, par Thierry Steiner) mardi 22 décembre 2009
S’il en était ainsi, la science serait impuissante. Or, nous la voyons chaque jour agir sous nos yeux. Cela ne pourrait être si elle ne nous faisait connaître quelque chose de la réalité ; mais ce qu’elle peut atteindre, ce ne sont pas les choses elles-mêmes, comme le pensent les dogmatistes naïfs, ce sont seulement les rapports entre les choses ; en dehors de ces rapports, il n’y a pas de réalité connaissable.
(La science et l’hypothèse ; Henri Poincaré) dimanche 20 décembre 2009
Les quatre grandes erreurs
Erreur de la confusion entre la cause et l’effet
I — Il n’y a pas d’erreur plus dangereuse que de confondre l’effet avec la cause : j’appelle cela la véritable perversion de la raison. Néanmoins cette erreur fait partie des plus anciennes et des plus récentes habitudes de l’humanité : elle est même sanctifiée parmi nous, elle porte le nom de « religion », et de « morale ». Toute proposition que formule la religion et la morale renferme cette erreur ; les prêtres et les législateurs moraux sont les promoteurs de cette perversion de raison.
Par Youri Kanounnikoff : .ogg (171,9 Kio) .mp3 (179 Kio) * (0′45)
(Le Crépuscule des idoles ou Comment on philosophe avec un marteau ; Friedrich Nietzsche) jeudi 16 juillet 2009
Tout ceci n’est qu’un préambule. Pour parler sérieusement, ce que je veux dire, c’est que le fait de croire que le travail est une vertu est la cause de grands maux dans le monde moderne, et que la voie du bonheur et de la prospérité passe par une diminution méthodique du travail.
(Éloge de l’oisiveté ; Bertrand Russell) dimanche 12 juillet 2009
Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l’aisance et la sécurité. Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela, nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n’y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment.
(Éloge de l’oisiveté ; Bertrand Russell) dimanche 16 novembre 2008
« La lecture demande, et là je voudrais vraiment souligner, certaines préconditions assez spéciales. On ne fait pas assez attention à ça. D’abord elle présuppose beaucoup de silence. […] Deuxième condition, un certain espace privé. […] Troisièmement […] avoir des livres. […] qui sont à vous, dont on est possesseur, qui ne sont pas empruntés. Pourquoi ? Parce que, il faut, il faut absolument avoir un crayon en main. […] Il faut faire des notes, il faut souligner, il faut se battre contre le texte en disant quelle bêtise […] C’est un dialogue vivant. Et, Érasme a dit : "Celui qui n’a pas des livres déchirés ne les a pas lus." C’est in extremis, mais il y a une grande vérité là-dedans. […] Et, ce sont les découvertes d’un livre qui change la vie. […] L’expérience du livre est celle la plus dangereuse, la plus passionnante qui soit. Le livre, bien sûr, peut corrompre. Mais quelle blague de ne pas le dire ouvertement. […] Mais, pas de censure, parce qu’on se trompe. Le censeur n’a finalement aucune autorité. »
.ogg (2,3 Mio) .mp3 (1,74 Mio) * (7′38)
(Extrait d’une émission À Voix Nue (Laure Adler, France Culture, 18 novembre 2003) :
George Steiner ou la passion de l’absolu : 2. Livre ; George Steiner) vendredi 19 septembre 2008
Une doctrine préalable ne se justifie pas d’elle-même au préalable. Elle se révèle idoine par ses incidences et par ses conséquences.
(La géométrie et le problème de l’espace ; Ferdinand Gonseth) mardi 17 juin 2008
Les gens sont des vampires, si je ne garde pas mon sang-froid je suis mort.
(Définitions, États d’Âme, Contresens et Sens Contraires ; Johnny Five) lundi 12 mai 2008
Qu’est-ce donc que la vérité ?
Une multitude mouvante de métaphores, de métonymies, d’anthropomorphismes,
bref une somme de relations humaines qui ont été rehaussées, transposées,
et ornées par la poésie et par la rhétorique,
et qui après un long usage paraissent établies, canoniques
et contraignantes aux yeux d’un peuple :
les vérités sont des illusions dont on a oublié qu’elles le sont.
[…]
En l’occurrence, les hommes fuient moins le mensonge que le préjudice provoqué par un mensonge. […]
C’est seulement dans ce sens ainsi restreint que l’homme veut la vérité.
Il désire les suites favorables de la vérité, celles qui conservent l’existence ;
mais il est indifférent à l’égard de la connaissance pure et sans conséquence,
et il est même hostile aux vérités qui peuvent être préjudiciables ou destructrices.
(La Philosophie à l’époque tragique des Grecs ; Friedrich Nietzsche) mercredi 7 mai 2008
L’homme peut croire à l’impossible, mais il ne peut pas croire à l’improbable.
(Aphorismes/ Sebastian Melmoth ; Oscar Wilde) jeudi 3 janvier 2008
Il me semble que ce qui est requis est un sain équilibre entre deux tendances : celle qui nous pousse à scruter de manière inlassablement sceptique toutes les hypothèses qui nous sont soumises et celle qui nous invite à garder une grande ouverture aux idées nouvelles. Si vous n’êtes que sceptique, aucune idée nouvelle ne parvient jusqu’à vous ; vous n’apprenez jamais quoi que ce soit de nouveau ; vous devenez une détestable personne convaincue que la sottise règne sur le monde – et, bien entendu, bien des faits sont là pour vous donner raison. D’un autre côté, si vous êtes ouvert jusqu’à la crédulité et n’avez pas même une once de scepticisme en vous, alors vous n’êtes même plus capable de distinguer entre les idées utiles et celles qui n’ont aucun intérêt. Si toutes les idées ont la même validité, vous êtes perdu : car alors, aucune idée n’a plus de valeur.
Ces médecins des âmes qui détruisent le génie à nos yeux en l’appelant pathologique, on devrait leur fracasser le crâne avec les œuvres complètes du génie en question… On devrait écraser à coups de talon tous les rationalistes bienfaiteurs de l’“humanité normale” qui rassurent les gens incapables d’apprécier les produits de l’esprit et de l’imagination.
[…] la mathématique est l’art de donner le même nom à des choses différentes.
(Science et méthode ; Henri Poincaré) samedi 4 août 2007
Je pardonne aux gens de n’être pas de mon avis. Je ne leur pardonne pas de ne pas être du leur.
(Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord) mardi 10 juillet 2007
Richard Feynman [prix Nobel quantique ] cite un moment où il eut un pressentiment que sa grand-mère venait de mourir. À ce moment, le téléphone sonne, et c’était un appel de ses parents. Il s’enquiert immédiatement de la santé de sa grand-mère : il se trouve que celle-ci se portait très bien. Or qui pense à compter le nombre de coïncidences non réalisées ?
(Synchronicité ; Wikipédia, 30 août 2007) mardi 19 juin 2007
Aussi un public ne peut-il parvenir que lentement aux Lumières. Une révolution peut bien entraîner une chute du despotisme personnel et de l’oppression intéressée ou ambitieuse, mais jamais une vraie réforme de la méthode de penser ; au contraire, de nouveaux préjugés surgiront qui serviront, aussi bien que les anciens, de lisière à la grande masse privée de pensée.
[…]
Les hommes se mettent d’eux-mêmes en peine peu à peu de sortir de la grossièreté, si seulement on ne s’évertue pas à les y maintenir.
(Réponse à la question : « Qu’est-ce que “les Lumières” ? » ; Emmanuel Kant) mercredi 6 juin 2007
[…] il [Moses Mendelssohn] a reconnu la thèse des Lumières selon laquelle la raison humaine est, par elle-même, apte à mettre au jour des vérités. Mais cette raison, naturellement présente en chaque homme, doit connaître une éducation si elle veut développer tout son potentiel, faute de quoi l’homme est condamné à rester intellectuellement un enfant. S’il est un premier sens au verbe aufklären (« éclairer »), c’est bien celui de développer ce potentiel naturel de compréhension de la raison humaine pour le porter à sa perfection, à sa maturité, à son âge adulte.
[…]
La servitude intellectuelle implique le préjugé, et les préjugés ont la vie dure. L’action qui libérera la raison humaine devra être adaptée aux circonstances, afin d’éviter le retour d’un obscurantisme tout renforcé de son triomphe sur des Lumières incapables de s’imposer durablement. C’est pourquoi une révolution n’est pas de mise en la matière car, dans l’urgence qui la caractérise, elle ne fait trop souvent que substituer un préjugé à un autre. La réforme et l’émancipation des esprits s’inscrivent dans la durée et elles passent obligatoirement par une conversion intérieure, rendue possible par l’absolument nécessaire liberté de penser et de rendre publique sa pensée.
(Éclairer les Lumières ; Cyril Morana) mercredi 6 juin 2007
Ceux d’entre nous qui sont forcés, par l’ignorance des sciences exactes, d’imaginer l’univers à travers un voile de langage non mathématique habitent une fiction animée. Les phénomènes, aujourd’hui – la continuité espace-temps de la relativité, la structure atomique de toute matière, l’état d’énergie des particules ondulatoires –, ne sont plus accessibles par le mot. Ce n’est pas un paradoxe d’affirmer que dans les domaines les plus opposés la réalité commence maintenant en dehors du langage verbal.
(La retraite du mot in Langage et silence ; George Steiner) mardi 15 mai 2007
L’appareil se révélait d’un maniement plutôt délicat : des années durant, on avait manipulé la radio en pressant des boutons et en tournant des cadrans ; puis avec l’évolution technique, on était passé aux touches microsensibles qu’il vous suffisait d’effleurer du bout des doigts ; à présent, vous n’aviez plus qu’à faire un vague signe de main dans la direction approximative de l’appareil et qu’à espérer. Certes, cela vous épargnait pas mal d’efforts musculaires mais c’était également synonyme d’une immobilité crispante et forcée si l’on voulait rester à l’écoute du même programme.
[…]
Ford continuait de compter calmement : c’est indubitablement le comportement le plus agressif qu’on puisse imaginer d’exprimer devant un ordinateur – un peu comme de se planter devant quelqu’un en lui répétant sans cesse : du sang, du sang, du sang, du sang…
(Le Guide du voyageur galactique / The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy ; Douglas Adams) lundi 14 mai 2007
Il est certain que la conviction – apparentée au sentiment religieux – que le monde est rationnel, ou au moins intelligible, est à la base de tout travail scientifique un peu élaboré. Cette conviction constitue ma conception de Dieu. C’est celle de Spinoza.
« La situation d’exil est en effet une situation de crise énorme, parce que tout le pilier sur lequel repose l’identité d’un peuple n’existe plus. Il n’y a plus de temple, il n’y a plus de roi, il n’y a plus de pays, plus d’unité territoriale. Donc pour survivre il faut trouver d’autres moyens de construire une identité. Alors c’est en effet les exilés, les scribes, les prêtres, qui vont construire cette identité, en reprenant un certain nombre des traditions antérieures, mais en décloisonnant ces traditions. C’est-à-dire la réforme de Josias va devenir symbole en fait du temple qui se transpose ou qui se transforme en synagogue. On va en fait mettre petit à petit, à la place du roi, Moïse, à la place du pays, la Torah. Donc on va, par le travail d’écriture et de réécriture, inventer le judaïsme tel qu’il va se concrétiser à l’époque perse, sous Esdras notamment. » (Thomas Römer, Université de Lausanne)
(La Bible dévoilée : 4e partie, Le livre ;
Thierry Ragobert
vendredi 5 janvier 2007
d’après le livre La Bible dévoilée : Les Nouvelles révélations de l’archéologie
d’Israël Finkelstein
et Neil Asher Silberman)
vendredi 5 janvier 2007
Pour revenir à ce film sur les grands ensembles, ce qui m’a le plus excité, c’est que l’anecdote qu’il décrit rejoint, sur le fond, l’une de mes idées les plus enracinées. L’idée que, pour vivre dans la société parisienne d’aujourd’hui, on est forcé à quelque niveau que ce soit, à quelque échelon que ce soit, de se prostituer d’une manière ou d’une autre, ou encore de vivre selon des lois qui rappellent celles de la prostitution.
(On doit tout mettre dans un film in Godard par Godard : les années Karina (1960 à 1967) ; Jean-Luc Godard) vendredi 29 décembre 2006
Quels grands progrès avons-nous fait ! Au moyen âge, ils m’auraient brûlé, à présent, ils se contentent de brûler mes livres.
(Sigmund Freud 1856 – 1939) mercredi 11 octobre 2006
Ce n’était qu’un prélude : là où l’on brûle les livres, on finit par brûler les hommes.
« Nous sommes en train de détruire la planète et il n’y en a pas de rechange. »
(Albert Jacquard) jeudi 28 septembre 2006
Je sais réfléchir, je sais attendre, je sais jeûner.
Dans le train direct pour Dourdan
Une jeune fille fait des mots fléchés
Je ne peux pas l’en empêcher
C’est une occupation du temps
Sur l’album Le sens du combat (Les Poétiques de France Culture) : .ogg (82,4 Kio) .mp3 (77,7 Kio) * (0′09)
Sur l’album Présence humaine
:
.ogg
(266,2 Kio)
.mp3
(158 Kio)
*
(0′40)
sur YouTube
(Paris-Dourdan in Le Sens du combat ; Michel Houellebecq) mardi 29 août 2006
y’a pas d’prochain’ fois
un’ fois mais pas deux
y’a pas d’prochain’ fois à ce petit jeu
il était un’ fois
il était un’ fois mais pas deux
.ogg (220,8 Kio) .mp3 (181 Kio) * (0′23) sur YouTube
(Une fois mais pas deux in Brigitte Fontaine est… ; Brigitte Fontaine) jeudi 10 août 2006
Once I had a little game
I liked to crawl back into my brain
I think you know the game I mean
I mean the game called « go insane »
Now you should try this little game
Just close your eyes forget your name
Forget the world, forget the people
And we’ll erect a different steeple
This little game is fun to do
Just close your eyes, no way to lose
And I’m right there, I’m going too
Release control, we’re breaking through
Par The Doors Live in New York : .ogg (670,7 Kio) .mp3 (566 Kio) * (1′12) sur YouTube
(A little game in The Celebration of the Lizard ; Jim Morrison) dimanche 9 juillet 2006
Bien informés les hommes sont des citoyens. Mal, ils deviennent des sujets.
Et si vraiment Dieu existait
|
« Qui que tu sois mon frère
(Pax hominibus ; John William ; Bob Calfati / Jean-Claude Deret) |
Vous faites mentir les miroirs. Vous êtes puissants
au point de vous refléter tels que vous êtes.
.ogg (52,4 Kio) .mp3 (47 Kio) * (0′06) sur YouTube
C’est la vision des nombres. Nous allons à l’Esprit. C’est très-certain, c’est oracle, ce que je dis. Je comprends, et ne sachant m’expliquer sans paroles païennes, je voudrais me taire.
Par Léo Ferré : .ogg (111,9 Kio) .mp3 (99,3 Kio) * (0′12) sur YouTube
(Mauvais sang in Une saison en enfer ; Arthur Rimbaud) mercredi 12 avril 2006
Il ne fait aucun doute qu’il existe un monde invisible. Cependant, il est permis de se demander à quelle distance il se trouve du centre-ville et jusqu’à quelle heure il est ouvert.
(Woody Allen) dimanche 26 mars 2006
Je hais la réalité, mais c’est le seul endroit où on peut avoir un bon steak.
Insupportable !
Le nihilisme est insupportable.
Lorsque le sens se déconstruit tu n’es plus rien.
Mais ce qu’il reste c’est la Réalité,
L’unique endroit où exister.
Le seul danger c’est toi-même,
Donc décide-toi !
(Définitions, États d’Âme, Contresens et Sens Contraires ; Johnny Five) vendredi 10 février 2006
L’avenir du savoir
Quel sera l’avenir du savoir ? Le savoir, contrairement au travail ou à la terre, peut être copié à l’infini. Le dynamisme de la création dépend de sa capacité à être reproduite, et les lois basées sur le principe de rareté sont absurdes dans ce contexte. La « tragédie des biens communs », l’argument utilisé pour justifier le clôturage de la terre dans le but d’augmenter au maximum la production, ne s’applique pas au savoir. La privatisation du savoir ralentit l’innovation et la productivité. Alors que les intérêts des entreprises soutenues par les gouvernements ne cessent de prolonger les échéances de la propriété sur la créativité humaine, cette prolongation se fait aux dépens du domaine public. Dans ce cas, qui est le voleur dans la lutte pour le clôturage des savoirs communs ? Cette lutte fait rage au niveau des institutions locales, nationales, régionales et mondiales, et c’est un débat que nous ne pouvons nous permettre d’ignorer.
(Pirateries ; Christine Schweidler, Sasha Costanza-Chock) vendredi 10 février 2006
Mets la folie en vergue et la raison au pot
Mets du sel dans la merde et de l’or sur tes mots
Et pars au-delà de toi
Pars au-delà du mec
Sois heureux métamec !
Sois heureux !
.ogg (348,6 Kio) .mp3 (300 Kio) * (0′38) sur YouTube
La seule formule universelle c’est l’Univers.
(Définitions, États d’Âme, Contresens et Sens Contraires ; Johnny Five) lundi 30 janvier 2006
À la chose la plus hideuse mêlez une idée religieuse, elle deviendra sainte et pure. Attachez Dieu au gibet, vous avez la croix.
À mon sens, la plus grande faveur que le ciel nous ait accordée, c’est l’incapacité de l’esprit humain à mettre en corrélation tout ce qu’il renferme. Nous vivons sur un îlot de placide ignorance au sein des noirs océans de l’infini, et nous n’avons pas été destinés à de longs voyages. Les sciences, dont chacune tend dans une direction particulière, ne nous ont pas fait trop de mal jusqu’à présent ; mais un jour viendra où la synthèse de ces connaissances dissociées nous ouvrira des perspectives terrifiantes sur la réalité et sur la place effroyable que nous y occupons : alors cette révélation nous rendra fous, à moins que nous ne fuyions cette clarté funeste pour nous réfugier dans la paix d’un nouvel âge de ténèbres.
(L’appel de Cthulhu ; Howard Philips Lovecraft) vendredi 13 janvier 2006
À mon sens, les réformateurs ont causé plus de tort à eux seuls que n’importe quelle autre force dans toute l’histoire humaine. Montrez-moi quelqu’un qui déclare : « Tout cela doit être changé » et vous aurez devant vous une tête gonflée d’intentions pernicieuses qui n’ont aucun autre exutoire. Ce que nous devons au contraire nous efforcer de faire toujours, c’est découvrir les cours naturels des choses et nous y insérer sans heurt. | |
Révérende Mère Taraza Extrait d’une conversation Dossier GSXXMAT 9 B. G. |
(Les hérétiques de Dune ; Frank Herbert) vendredi 13 janvier 2006
À celui qui a beaucoup réfléchi, toute idée nouvelle, qu’il l’entende ou qu’il la lise, apparaît immédiatement sous forme de chaîne.
L’important n’est pas ce qu’on a fait de moi, mais ce que je fais moi-même de ce qu’on a fait de moi.
L’humain naturel est un animal dépourvu de logique. Votre projection de la logique dans tous les problèmes n’est pas naturelle mais elle persiste à cause de son utilité. Vous êtes la personnalisation de la logique, vous êtes un Mentat. Pourtant, vos solutions sont des concepts qui, d’une manière très réelle, sont projetés hors de vous et qui demandent à être étudiés, inspectés, examinés sous tous les angles. »
“J’ai réfléchi longtemps et intensément à 2006 et mes espoirs vont évidemment à la paix dans le monde. Je continuerai de travailler aussi dur que je le peux pour poser les fondements de la paix.”
George W. Bush a souhaité au premier jour de l’an la paix dans le monde et une économie forte pour 2006
(Metro du mardi 3 janvier 2006) mardi 3 janvier 2006
(La retraite du mot in Langage et silence ; George Steiner) mardi 3 janvier 2006
Dès mes premières confrontations avec les textes de Brigitte Fontaine j’ai eu la certitude qu’un jour ou l’autre, on en parlerait comme d’Arthur Rimbaud. Il semble que pour la majorité chloroformée par les médias, ce soit l’autre, peut-être aujourd’hui… ou demain. Quand au personnage, peut être vous contenterez-vous, pour la cerner (?) d’un de nos premiers dialogues à la terrasse d’un restaurant de la rue Saint Benoît.
P.B. | Brigitte, je vais m’absenter quelques temps, je vais au Brésil. |
B.F. | Comment tu vas là-bas ?… |
P.B. | … En avion. |
B.F. | T’es fou, tu t’rends pas compte, il peut t’arriver n’importe quoi ! |
P.B. | T’es jamais monté dans un avion ? |
B.F. | Pas question. |
P.B. | Mais tu montes en voiture ? |
B.F. | … Oui mais il y a une époque où je ne montais jamais en voiture. |
P.B. | ??? Mais tu sortais de chez toi ? |
B.F. | D’accord, mais il y a une époque où je ne sortais jamais de chez moi ! Il peut t’arriver n’importe quoi… Quelqu’un peut de te cracher dessus ? |
P.B. | Tu restais chez toi ? |
B.F. | Oui ! |
P.B. | Un avion pouvait tomber sur ta maison… |
B.F. | … J’y pensais… |
P.B. | ?… ?… ?… |
(Pierre Barouh) mercredi 28 décembre 2005
— Rappelez-vous tout simplement qu’entre les hommes il n’existe que deux relations : la logique ou la guerre. Demandez toujours des preuves, la preuve est la politesse élémentaire qu’on se doit. Si l’on refuse, souvenez-vous que vous êtes attaqué et qu’on va vous faire obéir par tous les moyens. Vous serez pris par la douceur ou par le charme de n’importe quoi, vous serez passionné par la passion d’un autre ; on vous fera penser ce que vous n’avez pas médité et pesé ; vous serez attendri, ravi, ébloui ; vous tirerez des conséquences de prémisses qu’on vous aura fabriquées, et vous inventerez, avec quelque génie, – tout ce que vous savez par cœur.
— Le plus difficile est de voir ce qui est, – soupirai-je.
Nous parlons pour démontrer nos capacités informationnelles à nos congénères, en attirant leur attention sur des faits inattendus. Cela nous permet d’afficher notre valeur en tant qu’allié potentiel car l’homme est une espèce politique dont la survie est conditionnée par sa capacité à nouer de larges coalitions.
(L’origine politique du langage ; Jean-Louis Dessales) dimanche 13 novembre 2005
Dans cette joute avec l’esprit vivant des morts que nous appelons la lecture, notre rôle n’a rien de passif. Chaque fois qu’elle dépasse la rêverie, ou cet appétit sans conviction, fils de l’ennui, la lecture est une forme d’action. Nous mobilisons la voix, l’être entier de l’œuvre. En revanche, nous la laissons pénétrer en nous, non sans réticences d’ailleurs. […]
Il faut être prêt à prendre de grands risques pour bien lire. Prêt à sacrifier son moi, le contrôle qu’on a sur lui.
(Vers une culture plus humaine in Langage et silence ; George Steiner) lundi 26 septembre 2005
« Si, les dieux n’étaient pas ainsi, je cite, puérils et malheureux, ils ne leur faudraient pas ce qui est la chose la moins artistique du monde, le sacrifice et l’encensement. »
.ogg (123,9 Kio) .mp3 (111 Kio) * (0′14)
(Origines et Poétique 2/4 ; George Steiner) vendredi 16 septembre 2005
« Y’a pas de mot pour décrire ce danger-là. »
(ABCédaire, à la lettre W comme Wittgenstein ; Gilles Deleuze) mercredi 7 septembre 2005
7. Sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence.
(Tractatus logico-philosophicus ; Ludwig Wittgenstein) mercredi 7 septembre 2005
Le temps du lendemain ne peut être autre que ce qu’il sera en réalité.
L’égoïsme ne régnera plus dans les sciences quand on s’associera pour étudier. Au lieu d’envoyer aux Académies des paquets cachetés, on s’empressera de publier ses moindres observations pour peu qu’elles soient nouvelles et on ajoutera : “Je ne sais pas pour le reste”.
Les livres ne ressuscitent pas les morts, ne métamorphosent pas un idiot en homme raisonnable, ni une personne stupide en individu intelligent. Ils aiguisent l’esprit, l’éveillent, l’affinent et étanchent sa soif de connaissances. Quant à celui qui veut tout connaître, il vaut mieux, pour sa famille, le soigner ! Car cela ne peut provenir que d’un trouble psychique quelconque.
Muet quand tu lui imposes le silence, éloquent lorsque tu le fais parler. Grâce au livre, tu apprends en l’espace d’un mois ce que tu n’apprendrais pas de la bouche de connaisseurs en une "éternité" et cela, sans contracter de dette du savoir. Il te débarrasse, te délivre du commerce de gens odieux et des rapports avec des hommes stupides, incapables de comprendre. Il t’obéit de jour comme de nuit, aussi bien durant tes voyages que pendant les périodes où tu es sédentaire. Si tu tombes en disgrâce, le livre ne renonce pas pour autant à te servir. Si des vents contraires soufflent contre toi, le livre, lui, ne se retourne pas contre toi. Il arrive, parfois, que le livre soit supérieur à son auteur…
Une société vouée, par la concentration du pouvoir économique et politique, à une redistribution tellement inégale du bien être et de l’influence, ne peut, pour survivre, que produire en permanence un consensus populaire aux valeurs qui la soutiennent.
(Guerre et amour / Love and Death ; Woody Allen) mercredi 6 avril 2005
L’être est tout en cloisonnements. Le subconscient surtout est cloisonné. L’état second montre constamment des parties qui s’ignorent les unes les autres, qui ont et gardent leur savoir propre. Ce qui surprend toujours, c’est le subconscient savant *. On ne veut y croire. L’énorme activité à demi cachée de l’esprit devient ici évidente.
Le subconscient n’est pas ici ce que certains pensent, une sorte de réserve dormante, contenant les secrets d’autrefois.
Le subconscient est actuel, actif, prodigieusement actif, et reçoit un ravitaillement quotidien. À chaque minute, à chaque instant, on refait du subconscient. La principale tâche de l’homme est même de mettre en subconscience incessamment tout ce dont il n’a pas besoin, ou qui le gêne, ou dont il ne prend pas la peine de faire le tri ou l’élucidation.
Ce n’est pas sans raison, peut-être, que ce qu’on entend le plus souvent en hallucinations auditives, ce sont des voix confuses, des propos indistincts, du donné innombrable dont le conscient s’est débarrassé dans le subconscient faute de pouvoir l’utiliser. On se croirait dans un hall de gare, passant entre des groupes aux conversations vaguement remarquées, qui ne nous concernent pas, desquelles il importe pour notre tranquillité que nous restions en dehors. Voilà qu’ici malgré soi on est rentré dans la foule.
D’autres processus d’intensification sont en route.
La conscience (le sens de la situation) n’est plus cette sorte de plaine où se fait connaître le monde et soi-même par des signaux modérés, c’est à présent une sorte de pays accidenté où en éblouissements, en falaises instantanées, en stridences, il reçoit des signaux qui ne veulent rien dire, signaux dévastateurs de paix, éléments de la grande et polymorphe révolution contre sa souveraineté.
* C’est ce qui éberluait les exorcistes du Moyen Âge (mais il s’agissait d’états seconds plus achevés et de dissociations plus poussées). Plus elles sont profondes, plus profond est le savoir.
(Connaissance par les gouffres ; Henri Michaux) mercredi 6 avril 2005
Et je me suis reconnu poète. C’est faux de dire : je pense. On devrait dire : on me pense…
(Arthur Rimbaud) jeudi 31 mars 2005
Il n’est pas un moi. Il n’est pas dix moi. Il n’est pas de moi. Moi n’est qu’une position d’équilibre.
(Henri Michaux) jeudi 31 mars 2005
Et si nous voulions parler du moi ! Le moi est devenu une légende, une fiction, un jeu de mots : cela a tout à fait cessé de penser, de sentir et de vouloir !…
(Le crépuscule des idoles ou Comment on philosophe avec un marteau ; Friedrich Nietzsche) mercredi 24 décembre 2014
— Qu’est-ce que vous voulez ? demanda-t-il.
— Je cherche du travail, murmura Cole. […]
— Adressez-vous à l’office de Placement du Bureau fédéral du contrôle des activités,
dit l’homme d’un ton tranchant.
Vous savez que toutes les thérapeutiques occupationnelles doivent passer par l’office. »
Il n’existe que deux choses infinies, l’univers et la bêtise humaine… mais pour l’univers, je n’ai pas de certitude absolue.
En revanche, il est certain que l’emprise abusive des médias, notamment de la radio et de la télévision, constitue d’une certaine façon un viol des consciences, ou du moins peut y contribuer.
(Cerveau humain in Encyclopædia Universalis) mercredi 19 janvier 2005
À cette manière de faire il [Socrate] oppose une règle simple : dans le vrai dialogue, chacun considère le jugement de l’autre comme seul témoin fiable de la solidité de ce qu’il avance. Il n’est pas combat, mais mise à l’épreuve du jugement d’autrui et, conjointement, du sien. Il ne vise ni à simplement « changer d’opinion » ni à camper obstinément sur ses positions, mais à coopérer dans le but de mettre en évidence des principes et conclusions qui n’étaient pas donnés d’avance. La conscience de chacun, en la matière, demeure souveraine et n’a pas droit à la démission devant quelque argument d’autorité que ce soit. Le dialogue vrai est cette expérience rare à l’occasion de laquelle une exigence concertée de vérité conduit réellement à penser ensemble : on ne se fera pas de cadeau, non qu’on en veuille à l’interlocuteur, mais parce qu’on est deux à vouloir le vrai – désir satisfait par cette forme miraculeuse de partage où ce qui revient à chacun égale ce qui a été partagé : le dialogue ne divise pas, il unit en un avenir de commune vérité. Pour dialoguer réellement, pour raisonner ensemble, il faut certes être deux, chacun demeurant fidèle à sa propre volonté de vérité, mais dans le but de se rejoindre en un horizon qui n’appartient à personne parce qu’il est commun à tous : l’horizon du vrai.
(La Raison ; Michel Delattre pp.8–9) vendredi 24 septembre 2004
Je crois que Gauguin pensait que l’artiste doit rechercher le symbole, le mythe, agrandir les choses de la vie jusqu’au mythe,
alors que Van Gogh pensait qu’il faut savoir déduire le mythe des choses les plus terre-à-terre de la vie.
En quoi je pense, moi, qu’il avait foutrement raison.
Car la réalité est terriblement supérieure à toute histoire, à toute fable, à toute divinité, à toute surréalité.
Par Alain Cuny : .ogg (285,7 Kio) .mp3 (287 Kio) * (0′36) sur YouTube
(Van Gogh, Le suicidé de la société ; Antonin Artaud) mercredi 29 octobre 2003
C’est cela l’hacktivisme : conserver sans cesse les moyens intellectuels et techniques de la critique. Maîtriser le système, avant qu’il nous maîtrise.
(Édito in the Hackademy Manuel #3) mercredi 23 avril 2003
Marie-Jo s’en est allée inhaler
les parfums de l’indolence
elle reviendra si ça lui chante
si elle y pense
.ogg (173,8 Kio) .mp3 (148 Kio) * (0′19) sur YouTube
(Dans la foulée in L’imprudence ; Alain Bashung) mardi 22 avril 2003
Ils restreignent [TCPA et Palladium] votre liberté d’action sur votre PC afin d’autoriser fournisseurs de services et de logiciels à vous soutirer plus d’argent. C’est la définition classique d’un cartel : une entente industrielle qui change les termes de l’échange pour diminuer les avantages du consommateur.
(TCPA/Palladium FAQ ; Ross Anderson ; trad. Christophe Le Bars)
(L’incident Jésus / The Jesus Incident ; Le programme conscience ; Frank Herbert et Bill Ransom)
Résumé | Curriculum vitae | |
---|---|---|
Razors pain you; | Le rasoir fait mal ; | |
Rivers are damp; | La rivière est mouillée ; | |
Acids stain you; | L’acide fait des taches ; | |
And drugs cause cramp. | Le poison donne des crampes. | |
Guns aren’t lawful; | Le revolver n’est pas légal ; | |
Nooses give; | La corde rompt ; | |
Gas smells awful; | Le gaz ne sent pas bon ; | |
You might as well live. | Alors autant vivre. |
J’essaie, depuis quelques jours, de voir ce que l’idée de surhomme veut bien vouloir dire. Eh bien, plus je m’efforce d’en préciser le sens, plus je trouve qu’elle n’en possède aucun. C’est une idée plus puérile que délirante. Ou plutôt une grande idée pour adolescents ou pour la populace. Il y a tout un côté pénible chez Nietzsche, qui tient en grande partie à son excès de génie et à son manque de maturité, au fait qu’il n’a pas eu le temps de vieillir, je veux dire de connaître le désabusement, le dégoût du serein.
Je devins un opéra fabuleux : je vis que tous les êtres ont une fatalité de bonheur : l’action n’est pas la vie, mais une façon de gâcher quelque force, un énervement. La morale est la faiblesse de la cervelle.
Par Léo Ferré : .ogg (267,5 Kio) .mp3 (250 Kio) * (0′32) sur YouTube
(Délires Ⅱ : Alchimie du verbe in Une saison en enfer ; Arthur Rimbaud)
Je parle pour dans dix siècles et je prends date
on peut me mettre en cabane
on peut me rire au nez ça dépend de quel rire
Je provoque à l’amour et à la révolution
Yes ! I am un immense provocateur
Je vous l’ai dit
Des armes et des mots c’est pareil
Ça tue pareil
Il faut tuer l’intelligence des mots anciens
avec des mots tout relatifs, courbes, comme tu voudras
Il faut mettre Euclide dans une poubelle
.ogg (324,4 Kio) .mp3 (288 Kio) * (0′36) sur YouTube
L’on emprisonne deux milles colombes et les relâche lors d’une quelconque autocélébration, c’est un signe fort de liberté.
(Définitions, États d’Âme, Contresens et Sens Contraires ; Johnny Five)
La remise des cadeaux : après avoir vomi son réveillon, le chrétien s’endort l’âme en paix. Au matin, il mange du bicarbonate de soude et rote épanoui tandis que ses enfants gras cueillent sur un sapin mort des tanks et des poupées molles à tête revêche comme on fait maintenant.
(Dictionnaire superflu à l’usage de l’élite et des bien nantis ; Pierre Desproges)
Si donc, sur notre tableau allégorique, Beethoven croise un groupe d’aristocrates sans ôter son chapeau, cela ne peut pas signifier que les aristocrates soient de méprisables réactionnaires et lui, un révolutionnaire admirable ; cela signifie que ceux qui créent (des statues, des poèmes, des symphonies) méritent plus de respects que ceux qui gouvernent (des domestiques, des fonctionnaires ou des peuples). Que la création représente plus que le pouvoir, l’art plus que la politique. Que les œuvres sont immortelles, non les guerres ni les bals des princes.
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dessin d’après
Dune
de Frank Herbert (image trouvée sur le net) |
Johnny Five | samedi 14 août 2021 |